Un Européen dans la ville

Seng-Mi-Ka-El

Aujourd’hui, petite excursion au coeur de Daegu, direction le Duryu (두류) Park. Bus, métro, et nous voila arrivés. Outre un parc naturel ma foi agréable à visiter en ce temps plus printanier qu’automnal, j’allais avoir l’occasion de constater et confirmer un certain nombre de choses qui avaient pu me passer par la tête.

Bâtiment traditionnel, Duryu Park

Quelque chose m’avait frappé, dès mes premiers pas dans le métro de Daegu. Et la promenade dans le parc a définitivement confirmé ce que j’avais constaté : il y a très, très, très peu d’étrangers qui se promènent dans la ville. Seoul, en tant que centre névralgique du pays, ne connaît sans doute pas la situation au même degré – mais c’est une constatation assez incroyable à faire. Il est très rare de croiser des personnes caucasiennes, noires, arabes ou autres dans les rues.

Beaucoup d'enfants profitent de locations de vélos et rollers sur place.

Et cela engendre bien sûr regards et détournements de tête sur le passage d’un groupe de trois étudiants coréens et quatre (!!) étudiants étrangers se baladant ensemble. Autant les regards sont discrets dans le centre-ville et le métro, autant nous nous sommes transformés en véritables bêtes de foire en nous promenant dans le parc. Immense, il accueille des visiteurs de toutes les générations – particulièrement les plus vieilles, il faut le dire. On me l’avait dit, les personnes âgées ici ne sont pas forcément « habituées » à voir des étrangers, et vivent encore parfois avec l’idée du pays-ermite que pouvait avoir la Corée du Sud à une époque. Et on a vraiment pu le ressentir. Regards insistants, curieux, intrigués souvent, mais aussi parfois noirs ou agressifs. Mon imagination m’a peut-être joué des tours, mais j’ai cru entendre quelqu’un hurler « Foreigners !» à quelques mètres de nous.

Qu’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dit : nul n’a été ouvertement agressif envers nous, et la plupart de nos interlocuteurs sont extrêmement chaleureux et nous accueillent à bras ouverts. Mais… sentir ces dizaines de regards sur soi, dans le parc, ça a quelque chose de différent et d’un peu effrayant, il faut le dire.

Promenade, découvertes, discussions. Petit à petit, nous en venons à la politique. Nous parlons de nos gouvernements respectif, j’évoque ce que je considère comme quelque chose d’absolument honteux (bien que cela n’émeuve pas particulièrement nos camarades). Et puis nous en venons à quelque chose qui me brûlait les lèvres : le Japon.

La Corée du Sud et le Japon ont une histoire mouvementée, comme tout le monde le sait plus ou moins. Et quand ce genre d’évènements se déroule entre deux pays presque « limitrophes», dans lesquels l’honneur et la fierté jouent un rôle et ont une importance presque similaires, on peut légitimement s’attendre à des étincelles sur une longue durée  (lien, août 2010) – sans aller jusqu’à l’aspect militaire bien entendu.

Au cours de la journée, nous avons pu entendre quelques premières évocations du cas – surtout négatives, comme ce que j’imaginais. A la fois sur des points « triviaux» –  « Japanese people steal concepts from us, like some food, and they pretend they invented it.» – ou sur des points politiques un peu plus imposants – « They call it Sea of Japan, and every Korean people will correct it with East Sea. It’s not theirs, there’s even a Korean island there.»

Je dois dire que j’étais du coup curieux – effrayé, presque – d’apprendre que des étudiants japonais faisaient partie de ma promotion d’exchange students, à mon arrivée. « We don’t have anything against Japanese people actually», me rassure cependant JiHyun (지현), étudiante en langues, « it’s really more about policies and politicians. I have great Japanese friends, but politicians are stubborn».

Soit, il faut bien reconnaître que les étudiants Japonais que j’avais pu apercevoir ne semblent pas avoir de soucis particuliers. Je suis du coup plus serein – même si une remarque de Kelly (nom anglais d’un des étudiants coréens marchant à nos cotés) à propos d’une de mes interventions me laisse planer quelques doutes, malgré le ton de la plaisanterie – « This is the Japanese name, don’t use it – I don’t really like Japanese.»

Aah, allez, quoi qu’il en soit c’était une bonne journée – marche, soleil, juste ce qu’il faut de vent. La sauce rouge est toujours aussi rouge par contre…

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